L'Ecolière

L'Ecolière

La licorne

LA LICORNE, un symbole de pureté

Gracieuse jument blanche à la longue corne torsadée, la licorne fut considérée comme un animal bien réel de l'Antiquité au XVIIIe siècle. C'était un des plus puissants symboles chrétiens de pureté. Jusqu'en 1845, les voyageurs des quatre coins de la Terre décrivent cet animal fabuleux et fascinant comme une réalité incontestable, qu'ils décrivent avec force détails précis. 

 

Premières apparitions :

La licorne apparaît pour la première fois dans les textes de l'historien grec Ctésias, aux alentours de 400 av. J.C. Il rapporte les récits de voyageurs ayant exploré l'Inde, qui affirment avoir vu un âne sauvage aussi grand qu'un cheval, au pelage blanc, aux yeux bleu foncé et à la tête rouge ou violette ornée d'une longue corne noire de 50 cm de long... Un étrange animal qu'il baptise monokeros, et qui semble être issu d'un croisement entre l'onagre (un âne sauvage) et le rhrinocéros.

Pline l'Ancien (23-79 ap. J.-C.), en reprenant les propos de Mégasthénès, ambassadeur en Inde, parle d'une licorne dont la corne avoisinant un mètre de longueur, caractéristique tout à fait rare dans l'espèce. 

 

Face à l'humanité corrompue :

Egalement mentionnée par plusieurs auteurs romains, la licorne fait aussi une apparition dans la Bible, sous le terme hébreux de re'em, traduit par unicornus en latin, qui donna le terme "unicorne" par lequel on la désigne parfois. Dès lors, plus question de nier son existence : un animal présent dans le livre saint ne peut qu'exister et qu'être réel, ce qui explique que, au XVIIIe siècle, la licorne figura en bonne place dans les manuels de zoologie.

De nombreuses croyances se développent aussi peu à peu autour d'elle. Pour l'imaginaire chrétien, elle évoque plus que toute autre créature la sagesse et la pureté, par opposition à l'humanité corrompue.


Une licorne agressive :

Guillaume le Clerc de Normandie explique dans son Bestiaire Divin (Bestiaires du Moyen-Âge) que "la licorne a le sabot si dur et si tranchant qu'elle peut parfaitement se battre contre l'éléphant ; et l'ongle de son sabot est si aigu que, quoi que ce soit qu'elle en frappe, il n'est rien qu'elle ne puisse percer ou fendre. L'éléphant n'a aucun moyen de se défendre quand elle l'attaque, car elle le frappe sous le ventre si fort, de son sabot tranchant comme une lame, qu'elle l'éventre entièrement. Cette bête possède une telle vigueur qu'elle ne craint aucun chasseur." Habituellement symbole de beauté et de grâce, la licorne est présentée par Guillaume le Clerc de Normandie comme un animal qui peut se montrer redoutable au combat et d'une violence peu commune, contrairement à toute attente.


Quatre types de licornes :

L'unicornus sinoensis est une licorne asiatique que l'on retrouve de préférence dans les forêts de Chine, du Japon et de l'Indonésie. L'unicornis carcadan, quant à elle, vit en Arabie, en Inde, en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. L'unicornis europa, comme son nom l'indique, réside en Europe et l'unicornis alba est une licorne britannique. Il existe une licorne d'Asie, le ki-rin, qui rejoindra bientôt le bestiaire si ce n'est déjà fait...

 

Un remède universel :

Au cours du Moyen-Âge et de la Renaissance, les différents auteurs qui s'attachent à décrire la licorne enrichissent son image, jusqu'à faire d'elle une sorte de jument de taille moyenne, à la robe toute blanche, pourvue d'une grande corne d'ivoire ou de kératine laiteuse et torsadée, d'une petite barbe de chèvre, d'une très longue queue et de sabots fendus. Cette corne est aussi considérée comme un remède universel : réduite en poudre, elle est censée guérir les blessures, dissoudre tous les poisons, jusqu'aux plus violents, voire parfois ressusciter les morts mais elle était surtout connue pour ses propriétés aphrodisiaques. En effet, mélangée à de la bave de dragon, la poudre de corne de licorne redonnait toute sa vaillance aux chevaliers épuisés par les Croisades et leur assurait la totale fidélité de leur belle. Elle est aussi très efficace pour révéler la présence de substances toxiques dans les boissons : en effet, la corne de licorne a le pouvoir de purifier l'eau mais si celle-ci s'avère dangereuse, la corne se met à fumer.

Les autres parties du corps de la licorne sont tout aussi exploitables et d'une redoutable performance : une ceinture en peau de licorne éloigne la peste et la fièvre de son possesseur, des chaussures en cuir de licorne protègent les pieds qui les portent de toutes les maladies, le foie de licorne mélangé à du jaune d'oeuf est un excellent remède contre la peste d'après Hildegarde von Bingen. 

Cependant, Ambroise Paré (voir Histoire de la Dragonologie) remettait totalement en doute les propriétés miraculeuses de la licorne, jusqu'à son existence.


 

Damnés pour l'éternité :

Celui qui croise une licorne jouira d'une chance innée tout au long de sa vie. En effet, en voir une découle d'une chance extraordinaire : ne pouvant vivre qu'à l'état sauvage, les licornes se retirent dans de profondes forêts à l'écart des humains. Cependant, il semble que seules les jeunes filles vierges, qui n'ont jamais pêché ni en actions ni en pensées, peuvent réellement approcher l'animal. L'extrême pureté de ces jeunes âmes attire les licornes qui viennent en toute confiance poser leur tête sur leurs genoux.

C'est aussi un piège efficace : si la jeune fille lui passe une bride autour du cou, les chasseurs pourront ensuite la capturer et s'emparer de sa précieuse corne. Néanmoins, cette tactique n'est pas aussi facile qu'elle en a l'air : si la demoiselle laisse de mauvaises pensées occuper ne serait-ce qu'une petite seconde ses pensées, la licorne la transpercera de sa corne et s'enfuira aussitôt. 

Une autre astuce était aussi utilisée : un chasseur se plaçait devant un arbre, appelait l'animal fabuleux, celui-ci se ruait sur sa victime pour pouvoir l'encorner et au dernier moment, le chasseur s'écartait, laissant ainsi la licorne s'empaler dans le tronc. Ainsi, il avait tout le temps nécessaire pour pouvoir la capturer. 

Dans tous les cas, la chasse à la licorne se traduit par une damnation éternelle pour ceux qui s'y adonnent et l'animal, quelque soit la façon dont il est enfermé, se laisse volontairement mourir en captivité...

 


Un cadeau inestimable :

Vers l'an 800, le calife de Bagdad Haroun al-Rachid offrit une corne de licorne à l'empereur Charlemagne. 

Le pape Clément VII avait aussi fait don à François Ier d'une corne magique pour qu'il puisse parer aux tentatives d'empoisonnement de ses ennemis. 


"La Dame à la licorne" :

Qui n'a pas entendu parler de La Dame à la licorne, célèbre tapisserie de Flandre, tissée au XVe siècle et qui est conservée au musée de Cluny, à Paris ? Ces six tapisseries illustrent les cinq sens, ainsi que le retrait des sens. Dans la littérature courtoise médiévale, la licorne est un symbole de l'amour dévot que le preux chevalier porte à sa belle. Par evolution, elle est devenue l'image de l'amour charnel mais aussi celle de la chasteté et de la sainteté qui habitent le religion. La licorne est donc un animal assez ambigu, même si elle reste métaphore de pureté dans l'esprit collectif.

Voltaire a écrit à son propos : "C'est le plus fier animal, le plus terrible et le plus doux qui orne la terre".

 

Une licorne des mers et antilope sauvage :

Au Moyen-Âge, en Europe, la licorne se confondait souvent avec la licorne de mer : le narval (Monodon Monoceros). C'est la corne du narval qui était prélevée et offerte. Ce mammifère bien réel, vivant dans l'océan Arctique, a un corps de 4 à 5 mètres de long, qui se prolonge par une corne unique pouvant atteindre 3 mètres et qui n'est en fait que le prolongement de sa canine gauche. Il s'agit en fait d'une dent sur développée qui sert de capteur sensoriel au narval.

La licorne peut aussi être associée à l'oryx, une antilope unicorne réputée malfaisante, ainsi qu'au rhinocéros. D'ailleurs, aujourd'hui, les cornes de rhinocéros ont les mêmes vertus que celles des licornes, semble-t-il...





21/04/2011
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