L'Ecolière

L'Ecolière

Néfertiti

Néfertiti

la belle est venue

 

Reine à la beauté légendaire, femme du pharaon Aménophis IV, plus connu sous le nom d'Akhénaton, premier roi à instaurer un culte monothéiste, Néfertiti fascine et fait rêver. Quand j'avais sept ou huit ans, alors qu'une grande passion pour l'Egypte s'ouvrait dans mon coeur, mes yeux émerveillés ont croisé la photographie du célèbre buste de la Grande Epouse Royale. L'extraordinaire perfection de ses traits m'a subjuguée, elle paraissait vivante, à chaque fois que je la regardais, j'avais envie de la toucher ou de lui parler. Une mystérieuse magie émane de cette sculpture. Elle n'en est que d'autant plus appropriée étant donné que Néfertiti est une reine qui fait débat : au fil des recherches, plus j'ai approfondi et plus je me suis heurtée à un mur, aucun égyptologue ne semble avoir la même version des faits. Femme de pouvoir impitoyable ou épouse passionnée ? Membre du harem d'Aménophis III ou jeune fille de bonne famille ? Est-elle morte avant son mari ou au contraire est-elle montée sur le trône ? Est-elle l'auteur de la lettre aux Hittites ou est-ce sa fille, Ankhesenpaaton ? J'essayerai de ne pas omettre les différentes hypothèses que j'ai trouvées, afin de restituer toute l'ambiguïté de ce personnage fabuleux même si je vous avoue que j'opterais, d'un point de vue très personnel, pour la version de Christian Jacq. Les sources que j'ai utilisées pour rédiger cet article m'apparaissent fiables néanmoins, je ne peux pas le vérifier. Christian Jacq est un égyptologue de renom, c'est certain, c'est pour ça que je pencherais plutôt sur sa théorie. Mais bon, laissons-nous entraîner, l'énigme de Néfertiti n'en sera que plus envoûtante !

 

L'histoire d'une beauté incroyable :

En 1912, l'archéologue allemand Ludwig Borchardt découvre la maison d'un sculpteur pharaonique : Thoutmosis (ou Thoutmose). L'identité de l'artiste est éclairée par un fragment d'oeillère de cheval en ivoire portant l'inscription : "le favori du dieu parfait, le directeur des travaux et sculpteur Thoutmosis". C'est là qu'il met à la lumière du jour le fameux buste de la reine Néfertiti dont la beauté dépasse l'entendement. "[...] nous avions entre nos mains l'oeuvre d'art égyptienne la plus vivante. On ne peut pas la décrire avec des mots. On doit la voir" écrit-il dans son journal. 

Mais déjà un mystère se soulève. La représentation de la magnifique reine comporte une étrangeté : la souveraine est borgne. L'oeil gauche est manquant. Borchardt entreprend des fouilles méticuleuses pour retrouver la pièce égarée mais en vain. L'oeil a-t-il vraiment disparu ou l'auteur a-t-il délibérément omis de le représenter ?Aucune trace de colle destinée à coller l'oeil dans son orbite n'a été détectée sur cette partie. Certains pensent qu'il s'agissait d'une sculpture "modèle" pour les apprentis et qu'il représentait l'occasion d'apprendre aux élèves la manière dont on trace un oeil de déesse. D'autres imaginent qu'il est question d'un problème de vision que l'auteur a voulu immortaliser. Mais alors pourquoi est-ce la seule statue de Néfertiti à comporter ce détail ?

Le buste est placé dans un musée de Berlin depuis 1920. Les autorités égyptiennes tentent de le récupérer. Mais alors que la Seconde Guerre Mondiale éclate, Hitler interdit formellement que l'objet quitte l'Allemagne : il y voit la perfection de la race Aryenne...

 

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Des origines mal connues :

Le nom de Néfertiti se traduit en français par "la belle est venue". Serait-ce une allusion à des origines étrangères ? A ce moment-là, Néfertiti serait en fait la princesse Tadukhepa, l'une des filles du roi de Mitanni, au Nord-Est de l'actuelle Syrie. Elle aurait été donnée à Aménophis III, le père d'Akhénaton, pour enrichir son vaste harem. Etant de coutume que le fils prenne possession du harem du père, Tadukhepa aurait atterri dans le lit du nouveau pharaon et serait devenue Néfertiti. 

Cependant, cette hypothèse est peu crédible de nos jours : nombre d'égyptiennes de pure souche portent ce patronyme, il figure même parmi les nombreuses épithètes de la déesse Hathor. 

Dorénavant, on voit plutôt le "divin père" Aÿ comme son père. Celui-ci est possiblement le frère de la mère d'Akhénaton, Tiyi. Ainsi, Néfertiti est peut-être la cousine de son mari, ce qui expliquerait les malformations des enfants, dues à la consanguinité.

De plus, il est possible qu'elle ait une soeur, Moutnedjémet, épouse du général Horemheb qui régna peu de temps après Toutankhamon. Ce détail m'a frappée car il est en effet question d'une Mout, femme d'Horemheb, dans le roman de Christian Jacq, La Reine Soleil, qui traite de cette période. Les liens de parenté entre cette femme et Néfertiti ne sont pas précisés dans le roman.

 

Le règne qui bouleversa le plus puissants des empires :

Néfertiti sort définitivement de l'ombre lorsque son époux, Aménophis IV (Akhénaton), devient pharaon vers 1364. Au tout début de son règne, pharaon observe la tradition : il mène à bien un programme architectural unique en très peu de temps. Ceci est en partie dû à un nouveau système de blocs de pierre, les talatates, à la taille réduite et standardisée. Mais bientôt, le roi impose une idée révolutionnaire : celui d'un dieu unique. Pour une Egypte polythéiste depuis des siècles, renier la variété du divin pour l'associer à une seule paraît insensé, irréel. C'est pourtant le pari que fait Aménophis IV : il instaure le seul culte d'Aton, le dieu solaire (déjà existant dans le panthéon traditionnel) et décide de s'installer avec la cour dans un lieu "qui n'appartient à aucun dieu ni à aucune déesse", celui qui porte le nom moderne d'Amarna. C'est sur ce site qu'il fait bâtir la cité du dieu soleil, Akhet-Aton, "l'horizon du dieu Aton". La ville possède le plus grand temple de culte jamais construit à l'époque, entièrement dédié à Aton et construit à ciel ouvert de sorte que les divins rayons puissent occuper tout l'espace. Quant au roi, il change définitivement son nom : Aménophis devient Akhénaton, "celui qui rayonne pour Aton", quant à Néfertiti, elle prend le nom de Néfernéferouaton-Néfertiti soit "belle est la beauté d'Aton-Néfertiti".

 

excav_4_02.jpgRuines du site d'Amarna.

 

Un pouvoir politique inimaginable :

A partir de ce moment, la reine est omniprésente sur l'iconographie officielle. Elle est représentée comme une admiratrice inconditionnelle de son mari qu'elle doit égayer sans cesse. Mieux : les scènes les plus intimes du couple sont exhibées aux yeux du grand public, les peintres sont désireux de jouer sur le réalisme et puisent leur inspiration dans la vie personnelle du couple. "Cette passion,montrée ostensiblement, et la tendre sensualité qui l'accompagne sont uniques dans l'histoire égyptienne" dit l'égyptologue Marc Gabolde. 

L'assimilation du roi avec le dieu Rê et celle de la reine avec Hathor est issue de cette époque : Akhénaton est la part masculine et Néfertiti la part féminine sur Terre de l'oeuvre divine. Ainsi la reine symbolise-t-elle Hathor la déesse de l'amour et de la beauté - ce qui donne une autre interprétation de son patronyme, "la belle est venue", la déesse est venue s'incarner dans la reine. Plus tard, Ramsès II construira à Abou Simbel deux temples dans lesquels il est associé à Rê et où sa femme Néfertari est représentée sous les traits de la déesse Hathor. Clin d'oeil au couple d'Aton ?

Selon certains, la divinisation des souverains est une manière de renforcer le pouvoir et d'affirmer le rôle du couple royal dans la Création.

Néfertiti accompagne le roi dans la plupart de ses rituels et y participe. Elle est le plus souvent représentée derrière lui, imitant ses gestes d'offrande. Elle assiste aussi au rite viril du "massacre des ennemis" qu'elle pratique elle-même et reçoit les signes de vie offerts par le disque solaire au bout de ses rayons, au même titre que son époux. 

La reine symbolise aussi la beauté idéale et l'image du parfait amour conjugal. Elle est fréquemment représentée en épouse aimante aux côtés de son mari, échangeant des baisers passionnés sans aucune gêne. 

De plus, le dieu Aton est totalement muet, il ne s'exprime que par l'intermédiaire de ses porte-parole autoproclamés. C'est donc la famille royale qui affirme la présence de la divinité aux yeux de ses sujets. 

 

Une disparition brutale et mystérieuse :

Après la mort de sa belle-mère, la reine Tiyi, il n'existe plus de document attestant l'existence de Néfertiti. Serait-elle morte ? Recluse ? Tombée en disgrâce ? Le mystère reste entier. Elle disparaît entre l'an 14 (décès de Tiyi) et l'an 17 (décès d'Akhénaton) du règne de pharaon. L'ascension de sa fille aînée Merytaton au rang de Grande Epouse Royale aux côtés d'Akhénaton tend à penser qu'elle se serait éteinte avant l'an 17. Dans une lettre qu'il envoie à Akhénaton, Abi Milkou, prince Tyr au Liban, se décrit comme serviteur de pharaon et de Mérytaton, héritière des fonctions de sa mère décédée. 

Certains égyptologues affirment que Néfertiti aurait survécu à Akhénaton et qu'elle serait l'auteure d'une lettre adressée au roi des Hittites afin qu'il lui envoie l'un de ses princes pour devenir pharaon. D'après Christian Jacq, ce serait plutôt sa fille, Ankhesenpaaton qui aurait envoyé cette lettre après la mort du "divin père" devenu pharaon, Aÿ. 

 

Une momie introuvable :

Selon la volonté d'Akhénaton, toutes les momies royales devaient être enterrées dans la tombe d'Akhet-Aton, la ville du soleil. Mais après sa mort, la cité fut détruite et ce qu'il est advenu des corps reste un mystère. Les momies de la reine mère Tiyi et celle d'Akhénaton ont possiblement été retrouvées à Thèbes mais ce n'est pas certain.

En tout cas, celle de Néfertiti reste introuvable.

Cependant, une piste est vérifiable : quand Howard Carter entreprit des fouilles pour découvrir l'emplacement de la tombe de Toutankhamon, il avait prévu de creuser à plusieurs endroits différents. Quand il découvrit la tombe, il négligea les endroits qu'il avait prévu de fouiller. Ces endroits sont donc encore inviolés. Peut-être abritent-ils une tombe secrète. Des scientifiques ont mis au point un appareil pour détecter les échos et révéler l'existence d'une tombe sous le sable. Les tests sont positifs pour l'un des endroits délaissés par Carter. Néanmoins, la Vallée des Rois est une zone qui subit une bonne activité sismique, les échos ne sont pas rares et les tests sont peut-être faux. A voir...

 

 

Sources : Historia (numéro 786 - juin 2012) - documentaire Akhénaton et Néfertiti, écrit et dirigé par Michael Gregor - La Reine Soleil, roman de Christian Jacq - documentaire Néfertiti, la reine mystérieuse (BBC) produit et dirigé par Peter Minns



19/07/2013
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