Ravage
Ravage
René Barjavel
L'histoire :
En l'an 2052, l'humanité a atteint le paroxysme de toutes les prouesses scientifiques imaginables : voitures volantes, télévisions trois dimensions, conservation éternelle des morts, avions ultra-performants... Le tout rendu possible par la plus grande force que la nature ait donné à l'Homme : l'électricité.
Dans ce monde vivent François Deschamps et Blanche Rouget. Tous les deux sont les enfants de familles paysannes qui sont les dernières à cultiver la terre par la seule force de leurs mains et de leurs outils. Tous deux sont partis à Paris. François suit des études d'ingénieur et Blanche connaît un petit début de célébrité en tant que nouvelle étoile de la musique. Quand elle annonce ses fiançailles avec le directeur artistique de radio 300 pour lequel elle doit chanter, François décide de la sortir de cette folie d'enfant attirée par une vie facile et glorieuse. Mais à peine a-t-il pris la décision de retrouver Blanche que la catastrophe se déclare : l'électricité disparaît. Les avions s'écrasent, les voitures s'arrêtent, les appartements sont plongés dans un noir total et effrayant. La population panique, s'agite, ne comprend pas ce qui se passe, se demande si tout cela va s'arrêter et revenir à la normale. Les plus grands savants restent sans voix. Le gouvernement tente de rétablir le calme et d'apaiser les esprits affolés. Mais rien n'y fait ; la dernière heure de l'humanité a sonné. La chaleur torride, les incendies, les maladies, la faim, la soif ravagent les Hommes et les villes sans lumière...
Mon avis :
Eh bien, j'ai beaucoup aimé parce que je pense le roman bien fait. J'ai trouvé le monde de 2052 vraiment bien imaginé, avec des appareils qui ressemblent parfois aux nôtres - et là je salue le talent du visionnaire ! - un thème très intéressant, bien développé à mon goût, une intrigue passionnante, un enchaînement des événements haletant et sensationnel...
Pour le reste, je ne pense pas que je relirai le livre tout de suite parce que certaines scènes de violence m'ont quand même beaucoup émue parfois. Je comprends qu'elles soient racontées, je ne reproche pas aux héros de s'être montrés si cruels par moment, ces scènes sont inévitables dans un tel contexte mais j'avoue que c'est devenu difficile pour moi, surtout quand l'un des membres de l'équipe vient décapiter à la hache des blessés sans défense. Celle-là, elle m'a laissée un très mauvais souvenir.
Les personnages sont assez flous. Quand je repense par exemple à Tarendol où Jean est cerné dès les premières pages, pour François et Blanche, j'ai trouvé ça assez rapide, mais ça ne m'a pas dérangée. J'ai bien aimé les deux et à la rigueur, j'ai légèrement préféré Blanche parce que c'est elle que j'ai le mieux comprise. Pourtant, ce genre de personnage assez puérile ne me touche pas vraiment mais je l'ai quand même trouvée très pure et très attachante.
J'ai à peine reconnu le style de Barjavel ! Lui que je connaissais lyrique et poétique, je le redécouvre, aussi sous une très belle plume, mais une plume plus grave. Je ne sais pas si c'est moi qui n'aie pas lu de Barjavel depuis un moment mais le style m'a paru très nouveau comparé au souvenir de mes lectures précédentes.
Un autre point qui m'a marquée, c'est le dénouement. J'ai l'impression que l'auteur "conclut" par un refus absolu de toute science, de toute compréhension du monde. Je le comprends, et après avoir lu l'histoire, il est difficile de penser autre chose mais, renier les sciences d'une manière aussi radicale, ça m'a laissée perplexe. Dans notre société, les sciences ont quand même une place de roi ! Je pense que c'est ça qui me gêne dans la fin du roman, je suis trop influencée par mon entourage pour avancer, d'un ton ferme et décidé : "les sciences conduiront à la ruine des Hommes !". Je ne suis pas totalement convaincue. J'avais déjà remarqué les effets assez néfastes d'un excès de science autour de moi, cette idée que la science était peut-être mauvaise pour l'humanité m'avait déjà traversé l'esprit, bien avant de lire le roman. Mais j'en étais venue à la conclusion que la science est une très belle chose, mais qu'on l'utilise mal. Le monde fonctionne si bien quand on le laisse en paix, quel est le rôle de l'Homme dans cette paisible et merveilleuse harmonie ? Pour moi, c'est comprendre comment ça marche, c'est trop beau pour que personne ne vienne l'admirer ! Refuser ça, non, je n'arrive pas à intégrer l'idée. Quand le fils de François vient le voir pour lui offrir une machine qu'il a eu l'idée d'inventer en regarder la vapeur soulever le couvercle de la marmite sur le feu, c'est génial ! Je comprends la réaction de François mais au lieu de vouloir supprimer son fils, pourquoi il ne lui explique pas ? Et si les Hommes faisaient des sciences mais juste par curiosité, sans en parler à personne. Ce serait merveilleux, le rôle que je pense être celui de l'Homme serait respecté, sans danger pour les insensés qui voudraient l'exploiter à mauvais escient. Pourquoi conclure sur un refus bête et méchant de toute ouverture au fonctionnement de l'univers ?